? Pendant la lecture, profitez de notre playlist spéciale intitulée “Superbe Supertramp”.
En cette année 2017, nous célébrons les anniversaires d’albums mythiques. Be Here Now d’Oasis et The Great Escape de Blur fêtent leurs 20 ans, le Joshua Tree de U2 atteint la trentaine et Sgt Pepper’s Lonely Hearts Clubs Band des Beatles, pierre angulaire de la musique contemporaine fête ses 50 ans. C’est l’occasion pour notre équipe de revenir 40 ans en arrière… À cette époque les Beatles ne sont plus que quatre garçons dans un vent de créations en solo, la musique Punk commence à ravager le Royaume-Uni et le reste du monde, Queen est au sommet de son art et les Pink Floyd commence à ralentir le rythme avant un dernier triomphe deux ans plus tard. Mais en cette année qui connaît le départ prématuré du roi Elvis, un groupe continue son parcours aérien dans l’univers impitoyable de l’industrie musicale : Supertramp.
Le tandem Supertramp.
Supertramp, c’est la rencontre à la fin des années soixante de Rick Davies et Roger Hodgson. Sous le mécénat d’un riche bienfaiteur hollandais, le tandem notamment accompagné de Richard Palmer va commencer à tourner sous cette nouvelle formation. Tout comme les Fab four, une décennie plus tôt, le groupe part faire ses armes en Allemagne, notamment à München.
De retour outre-Manche, le groupe émet le désire d’enregistrer un premier album. Par un habile jeu de relations, ils décrochent un contrat chez A&M Records et partent travailler sur cet opus au titre éponyme : Supertramp (en écoute ➥ ici). Composé essentiellement de chansons écrites par Roger Hodgson, le succès n’est pas au rendez-vous malgré de très bons éléments comme le titre Surely ou Try Again, marathon musical de plus de 10 minutes qui montre les audaces très Rock Progressif du groupe.
En 1971, le groupe prend la décision de changer totalement de style et signe l’album Indelibly Stamped (en écoute ➥ ici). L’album est plus “rock”. Beaucoup plus agressif, un peu à la manière de Led Zeppelincomme l’illustre le morceau Potter. Le succès est cependant toujours absent. Palmer et les autres musiciens du groupe partent laissant Hodgson et Davies dans l’œil de la tempête.
Crime Of The Century : Une première empreinte sur le rock alternatif.
À l’été 1972, Supertramp voit le saxophoniste John Helliwell, le bassiste Doogie Thomson et le batteur Bob Siebenberg rejoindre ses rangs. La formation prend alors une dimension nouvelle et se remet au travail.
L’année 1974 voit sortir Crime Of The Century (en écoute ➥ ici). Il s’agit en effet du premier véritable succès du groupe, ses premiers tubes apparaissent : School, Dreamer, Crime Of The Century. Mais cet album va avoir un autre effet. Il va littéralement lancer le groupe dans la galaxie du rock expérimentale jusqu’alors dominé totalement par les Pink Floyd et leur Dark Side Of The Moon paru un an plus tôt. Tous les éléments du genre sont réunis dans cette pièce artistique de qualité. Crime Of The Century épate par sa grande richesse et variété musicale. Il élève Rick Davies au rang de pianiste de haut vol. Ses influences Blues et Jazz ressortent. Que ce soit sur le solo de piano de School ou sur Bloody Well Right qui participe à définir le son du groupe grâce notamment à l’utilisation de clavier Wurlitzer, Davies sous couvert d’un groupe très technique démontre sa capacité à composer des mélodies uniques. Mais la force de Supertramp, et c’est aussi ce qui fait la force de tout les groupes de légende, c’est la confrontation.. La guerre des cerveaux ! Roger Hodgson à cette période s’inscrit comme le challenger de Davies, proposant des pièces musicales tout aussi réussies. On citera le splendide Hide In Your Shell ou le tube Dreamer. Comme son partenaire, Roger s’impose comme un musicien d’une grande technicité. L’utilisation de la pédale d’effet Wah Wah sur Bloody Well Right permet entre autres de s’en rendre compte. Sans compter que le saxophoniste John Helliwell y est pour beaucoup également dans la réussite du groupe. Le saxophone arrive à grand pas dans la musique de l’époque. Cela donne un ton nouveau à la musique alternative et à la Pop. Certes ce n’est pas le premier saxophoniste à se confronter à ce style mais on peut dire qu’il figure parmi les musiciens ayant le mieux démocratisé le saxophone courant seventies.
La crise ? Quel crise ?
En 1975 sort l’album Crisis What Crisis (en écoute ➥ ici). Supertramp confirme et se place plus que jamais comme l’un des grands ambassadeurs de la Pop avec des petits bijoux de création.
L’album est marqué également par l’émancipation de Roger Hodgson qui éblouit par ses compositions. Avec des balades Folk telles que Sister Moonshine, des morceaux Pop comme Lady ou des pièces plus expérimentales comme A Soapbox Opera les inspirations sont délibérément envolées. Il semble également tirer son partenaire Rick vers le haut. Ce dernier signe un Ain’t Nobody But Me qui ferait saturer n’importe quel poste de radio de l’époque. La maîtrise instrumentale est époustouflante. La richesse de cet album permet à Supertramp d’avoir une setlist assez conséquente pour envisager de plus grosses prestations scéniques…
Nous sommes en 1977. 10 ans après le fameux “Summer of Love” qui a vu exploser les synapses de la création artistique, Supertramp s’apprête à sortir Even In The Quiest Moments (en écoute ➥ ici). Sept titres composent cet album. L’enregistrement est le théâtre des premières tensions dans le groupe. C’est d’ailleurs pour cela qu’une image brisée est insérée sur le verso du disque. Il s’ouvre avec le tube Give A Little Bit et enchaîne avec Lover Boy, formidable power ballad. Mixé par le talentueux Geoff Emerick, célèbre pour sa collaboration avec les Beatles, l’album est un exemple de cohésion. Les deux piliers du groupe signent des morceaux d’une hauteur exceptionnelle. Après trois titres de Hodgson, trois titres de Davies il était temps de casser cette harmonie…
Si l’on voit Even In The Quiest Moments comme un match entre Davies et Hodgson, à la fin de For Now On on peut se dire : “match nul, fin du match”. Mais un morceau de dix minutes écrit par Hodgson vient rebattre les cartes : Fool’s Overture. Ce morceau fait partie de la longue liste d’œuvres où l’on se pose la question suivante : “Comment une telle prouesse artistique peut-elle être possible ?”. Introduction de piano assez classique et moderne, collage sonore avec discours d’Hitler et de Churchill, parties synthétiques, saxophone de folie… Quel lyrisme. On peut voir ici le début de la suprématie de Roger dans le groupe. Mais Supertramp en a encore dans le ventre et se remet au travail pour un nouvel album.
Un petit déjeuner en Amérique.
En 1979, alors que les Floyd triomphe avec The Wall, Supertramp publie ce qui est encore considéré aujourd’hui comme son œuvre majeure : Breakfast In America (en écoute ➥ ici). Le genre d’album qu’on pourrait considérer comme une compilation. Outre la chanson titre Breakfast In America, cet opus regorge de tubes : Goodbye Stranger, The Logical Song, Take The Long Way Home, Child Of Vision…
Pour beaucoup, Breakfast In America est vu comme une satyre de la société américaine. Aujourd’hui encore, certains y voient même sur la pochette montrant Manhattan vu d’avion une annonce du 11 septembre. Commercialement, c’est l’un des albums les plus vendus de l’histoire, dépassant plus de 20 millions de copies dans le monde. En France c’est le second record de semaines à la têtes des ventes avec 40 semaines, juste devant le Dark Side Of The Moon de Pink Floyd (26 semaines). D’un point de vue artistique cependant, l’album semble plus complexe… Parfois, il est même légèrement incohérent. En effet comme le disent certaines critiques de l’époque, c’est un album qui passe très bien à la radio. Trop commercial alors ?C’est en tout cas un élément qui peut faire perdre un peu de crédit au groupe par rapport aux grands albums concepts de rock alternatif de la fin des seventies.
Les derniers mots de Roger…
Après une tournée mondiale couronnée de succès, Roger Hodgson alors au sommet de sa carrière annonce qu’il quittera Supertramp après un ultime album et une dernière salve de concerts avec le groupe. Officiellement, le départ est motivé par un raz-le-bol de la part d’Hodgson du star-system. En off certaines tensions apparues au moment de l’enregistrement de Even In The Quiest Moments ne se seraient pas dissipées.
Cet ultime album s’intitule …Famous Last Words… (en écoute ➥ ici). Il sort en octobre 1982. Reprenant tout les ingrédients ayant fait le succès de Breakfast In America, l’album est marqué par le tube It’s Raining Again et un puissant morceau de fin : Don’t Leave Me Now. C’est également la première fois que Supertramp se met au clip vidéo. Tout d’abord pour It’s Raining Again, un clip dans lequel on voit chaque membre du groupe apparaître dans la trame narrative. Le second clip est plus classique et épuré , il concerne la chanson My Kind Of Lady.
“It’s Raining Again”.
La crise des eighties.
Les années 80 sont dures pour le Rock Alternatif qui commence à s’essouffler, et Supertramp désormais privé de Roger Hodgson n’échappera pas à cette crise.
En 1985 parait Brother Where You Bound (en écoute ➥ ici)porté par le tube Cannonball.
Si l’album demeure intéressant le succès est moindre que pour les précédents opus. La grande particularité de l’album réside dans le fait que tous les titres s’enchaînent. La seule interruption étant due au changement de face du disque. C’est une sorte de medley ou si vous préférez un long morceau, très long morceau. On note également les participations de David Gilmour de Pink Floyd pour les solos sur Brother Where You Bound, ainsi que Scott Gorham à la guitare rythmique.
En 1987, le groupe revient avec l’album Free As A Bird. Le succès est mitigé. L’année 1987 marque également la fin d’un contrat moral passé entre Rick Davies et Roger Hodgson stipulant que les chansons de Hodgson ne devaient pas être jouées par Supertramp sur scène. La plupart des tubes étant signés Hodgson, Rick Davies brise cet accord et se sert allègrement dans toute la discographie du groupe pendant la tournée promotionnelle de Free As A Bird.
Supertramp et la scène.
Nous nous sommes attardés sur les prestations studio du groupe. Cependant les morceaux de Supertramp sont taillés pour le live. Tout comme les grands noms du Rock Alternatif que sont Pink Floyd ou Genesis, nous pouvons nous attendre à voir des musiciens appliqués sur scène. C’est certes le cas, mais Supertramp amène une dose de folie que les autres groupes du genre n’ont pas.
Outre les excellentes scénographies faites de sons et de lumières révolutionnaires pour l’époque, le passage des morceaux du studio à la scène se fait avec une virtuosité effarante. Tout est reproduit en direct. Une véritable prouesse lorsque l’on connaît la richesse instrumentale du groupe. En 1980, Supertramp sort son unique album live avec Roger Hodgson. Le Live In Paris’ 79 (en écoute ➥ ici) est considéré comme l’une des meilleures prestations live jamais enregistrées par le groupe.
And Now…
Supertramp et Roger Hodgson ont travaillé ensemble au début des années 90 pour la sortie de deux best-of.
Une réformation était même envisagée. Son échec étant dû pour certains à une trop forte personnalité de Hodgson qui ne voulait rien concéder, et pour d’autres à un désaccord sur les affaires du groupe impliquant la femme de Rick Davies. Rick Davies reforme le groupe en 2001, 2011 et 2015 pour des tournées. Mais la tournée 2015 est annulée après le diagnostic d’un cancer foudroyant pour ce dernier. En parallèle Roger Hodgson à repris la scène en 2001 avec le All Stars Band de Ringo Starr. Il avait abandonné la scène après qu’un accident ménager lui ai cassé les deux poignets en 1987. Il continue de tourner en reprenant les plus grands tubes de Supertramp ainsi que ses compositions solos. Des compositions sur lesquelles RefrainS s’était attardé dans un article précédent où nous vous avions parlé de son premier album solo In The Eye Of The Storm. Notre équipe avait même eu le privilège de le rencontrer et d’échanger quelques mots avec lui avant son concert au Grand Rex à Paris au mois de mai dernier.
Nous dédions cet article à notre ami Olivier Proton, passionné du groupe et qui a été à l’origine de ces mots.
À bientôt sur RefrainS.
T.
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