À partir d’aujourd’hui et ce jusqu’à la fin de l’année, nous vous dévoilons les top 10 respectifs des albums de l’année 2017 selon les membres de la rédaction. Voici donc celui de Tom.
Il est grand temps de revenir sur des albums qui ont illuminé 2017 mais ne nous jetons pas trop furtivement dans le vif du sujet. Il est bon pour comprendre les tenants et les aboutissants des choix que j’ai fait, de tenir quelque avant-propos.
Il n’est jamais évident de parler d’art et de musique plus particulièrement. Il s’agit de donner un avis sur des pièces artistiques que des gens ne vont pas seulement “contempler” mais bel et bien “ressentir”. Il demeure une part de subjectivité par la place que prennent nos sentiments face à l’art. Certaines personnes vont être totalement transportées par des titres ou des albums pour des raisons personnelles. Certaines sonorités les émerveillent, certains textes les touches. Mais comment pouvons-nous parler objectivement de musique ?
Pour cela, il faut définir des critères bien précis pour dépasser l’adage du “goût et les couleurs”. En ce qui me concerne, pour ce top 10 de l’année 2017, j’ai fait le choix de valoriser plusieurs éléments.
Tout d’abord la musique en elle même. Dans une époque où cette dernière devient de plus en plus facile à jouer via l’informatique notamment, j’ai fait le choix de mettre en valeur la maîtrise instrumentale plutôt que l’aspect textuel. C’est notamment l’une des raisons qui font qu’aucun album de musique électronique ou de Rap ne figure dans ce classement ; non pas qu’il en existe de qualité bien au contraire mais je considère qu’il ne faut pas comparer ce qui ne l’est pas. Je me vois mal dans un classement où ce critère est appliqué,(même un top 50) laisser se côtoyer un album de Ritchie Blackmore dont la construction répond aux plus grands compositeurs classiques et un album de Kendrick Lamar qui, même pourvu de moultes qualités n’aurait pas sa place au milieu des gammes pentatoniques et des rubato.
Le second élément pris en compte est la production. C’est là que certains albums de Rap bien produits auraient put trouver leurs places. Cependant sur un choix limité à 10 albums je n’ai pu en sélectionner.
Enfin le dernier élément apparent est l’évolution de l’artiste. Je prends en compte ce que l’œuvre apporte de plus non seulement à l’industrie musicale mais également à l’artiste lui-même. Je veux valoriser les premiers albums réussis de jeunes artistes, les retours gagnants de certains anciens ou enfin une évolution majeure de certains groupes.
Faisons maintenant le point de cette année 2017 ! Tristement, et une fois encore, les têtes d’affiches se nomment Coldplay, Ed Sheeran ou encore U2… Des artistes qui marchent malgré qu’ils aient attrapé ce que j’ai surnommé la “Ringoïte aiguë”. Autrement dit, ils ont une propension à sortir “l’album de trop” tous les 6 mois. 15 ans que Coldplay ou bien U2 pour ne citer qu’eux se reposent sur des acquis et nous sortent exactement le même album, un peu à la manière du regretté Jean D’Ormesson qui nous a écrit environ 20 fois le même roman. Il est peu étonnant de les trouver une nouvelle fois absents de ce top. Mais outre ces nouvelles déceptions, cette année nous a réservé de belles surprises. Voyons cela ensemble.
10/ David Bowie — No Plan — Columbia Records ??
Il était notre numéro un l’an passé avec son album Blackstar. Voici No Plan, son petit frère. Cet EP est une œuvre posthume et il convient de l’écouter avec prudence comme tout œuvre posthume. Et bien ? Ce Bowie est-il de la veine loupée du Milk And Honey de John Lennon ou bien plutôt du revigorant Brainwashed de George Harrison ?
Bowie fini ici en beauté son ultime rappel. Tout comme dans Blackstar, l’artiste nous joue ici ce qui sera la musique de la prochaine décennie. À mi-chemin entre Free-Jazz, musique psychédélique et électronique, les rythmiques envoûtantes de “Lazarus” nous transportent dans un ultime voyage vers les étoiles au côté de celui qui aura tant fait pour l’art.
9/ Liam Gallagher — As You Were—Warner Bros. Records ??
À défaut de voir se profiler la reformation d’Oasis, Liam et Noel Gallaghersortent presque en même temps un album solo. Depuis la séparation des deux frangins on ne peut pas dire que Liam et son groupe Beady Eye aient réussi à déchaîner les foules. Il est donc temps pour Liam de tourner la page Oasis avec ce premier véritable album solo… Un album qui pourtant transpire l’ancien groupe de Britpop des années 90 (notre chronique ? ➥ ici).
Le bad boy produit ici un album brut qui servira sûrement de base pour construire à l’avenir des œuvres se détachant de l’ADN “Gallagher”.
Cet année est une véritable croisée des chemins pour les deux frères ennemis : la réussite de Liam vient percuter l’album de Noel dont on espère qu’il ne demeurera qu’une simple erreur de parcours.
8/ Dhani Harrison — In///Parallel — BMG Rights Management ??
Lorsque l’on interroge Olivia Harrison sur le passé, celle-ci répond que tout a vieilli sauf “George”… Un moyen de mettre en exergue la ressemblance frappante entre Dhani Harrison et son père. Il n’est pas évident d’être le fils d‘un Beatles. Julian et Sean Lennon s’en sont vite rendu compte tout comme James McCartney qui peine à finir ses projets malgré quelques jolies fulgurances.
En ce qui concerne Dhani, il demeure un autre souci. La voix du fils est exactement la même que celle du père. On peut parler véritablement de sosie vocal. Le premier objectif d’un “fils de” dans le monde de l’art est d’arriver à dépasser la comparaison avec son paternel. Une mission quasiment impossible lorsque l’on a la même voix que ce dernier. Pourtant, dans ce premier véritable album solo, Dhani Harrison surprend. Notamment en ce qui concerne cette voix qu’il camoufle sans cesse. Certes, il est dommage quand l’on sait à qu’elle point elle est belle, mais cet album In Parallel se veut conceptuel. L’influence indienne héritée de son père est présente, mais le jeune Dhani se défend et parvient à imposer un style propre et maîtrisé.
7/ Duke Garwood — Garden Of Ashes — Heavenly Recordings ??
Paru en début d’année 2017, l’album du britannique Duke Garwood sent bon les ateliers de lutherie.
Cette formule est certes un peu bizarre, mais il suffit d’écouter le Blues bourdonnant de Garwood pour sentir l’odeur du bois vous transpercer les narines.
Ce qui fait de cet album une réussite c’est le paradoxe entre une mélodie simple propre au blues et un accompagnement instrumental rempli de subtilité. L’album est brut, livré comme en sortie d’usine, on touche ici au plus près les touches du Rhythm & Blues tout en gardant la touche Alternative propre à son auteur.
6/ Chris Thile & Brad Mehldau — Chris Thile & Brad Mehldau — Nonesuch Records ??️️
Écouter du Jazz en 2017 revient un peu à abandonner la bière et le Jack Daniel’s pour un vin de Bordeaux ou excellent Sauternes.
Ce style peine toujours à trouver sa place auprès d’un public non initié.
Notre duo est certainement ce qui se fait de mieux cet année dans le genre.Un album fait pour les amateurs du mélange succulent de banjos, piano, guitare et contrebasse…
On retrouve une proportion voix/instruments déséquilibrée, ce qui peut perdre certains auditeurs mais l’album ne se veut pas non plus fermé.
Bien qu’étant un véritable album de Jazz, sa construction instrumentale reprend des codes proches de la Soul et de la musique Pop. Certes, ces deux styles là sont issus du Jazz mais ils aparraissent ici subtilement pour démocratiser le genre.
5/ The Lemon Twigs — Brothers Of Destruction — 4AD ??️
Nouvel essai pour les deux frères de Long Island. Après le remarquable Do Hollywood fin 2016 qui a secoué une bonne partie de la critique et du public, ils sont de retour avec un EP.
Au premier abord ce court album est apparu décevant par le manque de liant des morceaux. Mais les frères d’Addario continuent tout de même d’épater avec des compositions étonnantes comme “Night Song”. Mais sur cet EP ce sont sur les ballades qu’ils s’illustrent le mieux avec une inspiration hybride née d’un lien magique entre les productions typiques d’un John Lennon ou de Brian May. On peut citer le morceau “Beautiful”. Mais les frères de la destruction peuvent se montrer encore plus étonnant avec des morceaux de chants en canon suivi de balades Folk comme le final “Light And Love”.
4/ Little Steven — Soulfire — Wicked Cool Record Co. ??️
C’est le retour du Pirate du E Street Band en cette fin d’année. Little Steven, fidèle bras droit de Bruce Springsteen depuis plusieurs décennies nous propose l’album Soulfire.
Et c’est un vrai délice ! Nous citions en début de top des artistes comme Coldplay ou U2 nous sortant le même album chaque année… Il est vrai que pour le Boss c’était à peu près le même problème… Mais là ! Son guitariste fétiche qu’est Little Steven nous sort cet incendie de l’âme ! Et pour citer mon ami “Eric L’aventurier” lorsqu’il m’a conseillé l’album : ”C’est exactement ce que Springsteen ne fait plus depuis 20 ans et qu’il devrait faire”. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que cela fonctionne. L’album est en tout point fidèle à ce qui a fait la renommée du E.Street Band. Une puissance se dégage de l’album sans qu’il y ait besoin d’un “Boss” pour venir hurler dans le micro avec une voix cassée.
3/ The Black Angels — Death Song — Partisan Records ??️
Death song de The Black Angels est certainement l’une des plus belles réussites de l’année. Nous sommes ici dans une tournure psychédélique qui se respire dès la pochette jusqu’au moment où le bras de la platine se relève pour laisser place au silence. L’album s’ouvre avec “Currency”, un morceau annonçant le début du voyage, car oui, c’est bel et bien un voyage que le groupe vous propose. L’album s’écoute avec aisance et va crescendo. On commence par planer puis arrive le morceau “Medecine” qui ouvre vos synapses et amène vos sens à cette musique si particulière. Une musique pourtant peu représentée de nos jours.
2/ Foo Fighters — Concrete & Gold — Roswell Records ??️
Après un précédent EP prometteur, les Foo Fighters sortent au début de l’automne un album d’exception. Bien que sa promotion n’ai pas été si accentuée que cela, le groupe de Dave Grohl nous met en garde sur la pochette : “Testing limits of speakers Everywhere”.
Comme tout album des Foo Fighters, ce Concrete & Gold est énergique et on peut dire que c’est leur marque de fabrique. On note une nette évolution, ce qui faisait défaut auparavant, c’était parfois un manque de mesure et d’équilibre entre les morceaux. Concrete & Gold apporte cette touche manquante avec un album bourré d’idées au niveau de la production : on doit relever de sublimes harmonies et un équilibre au niveau de la place de chaque guitare sur la piste, des chœurs ou des arrangements rythmiques. Les morceaux s’enchaînent dans avec cohérence et place cet album comme futur référentiel du groupe.
1/ Foxygen — Hang — Jagjaguwar ??️
Voilà désormais le moment de parler de ce qui s’est fait de mieux selon moi en 2017. Et pourtant, que les critiques sont dures avec ce groupe. On reproche à l’album son côté trop “Pop symphonique”, ses arrangements orchestraux, la ressemblance vocale avec Mick Jagger ou encore un peu trop de grabuge et de folie. Mais en soit si ces éléments sont vérifiables, en quoi cela en ferait un mauvais album ? Nous vivons à une époque où nous prenons plaisir à détester des groupes aussi rapidement qu’il nous ont ébloui et Foxygen n’échappe pas à la règle. Il s’agit certainement de l’un des groupes les plus prometteurs du moment mais son identité peine à se définir… En soit cet album détient le même potentiel que l’album We Are The 21th Century Ambassadors Of Peace & Magic de 2013 mais avec une production beaucoup plus soignée et c’est ce qui fait toute la différence. Foxygen remet à sa sauce l’âme même de la musique Pop avec son “Follow The Leader” où claviers et orchestre se répondent. Dans le même genre, “Avalon” et ses chœurs n’est pas en reste et vous ramène en 1967 et son Flower Power. L’album est net, propre et sans bavure et figure donc ici au sommet de ce top pour ses indénombrables qualités harmoniques, ses arrangements audacieux et sa production soignée.
À bientôt sur RefrainS.
T.
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