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[Chronique] Rival Sons – Feral Roots (2019).

Mes amis l’heure est grave ! Le Rock a pété un boulon, et le remède se doit d’être puissant. Après que les organisateurs de Coachella aient uni Neil Young, Bob Dylan, Paul McCartney et les Who, voilà qu’une autre bande de promoteurs gâteux veut organiser une réunion du troisième âge. Cette fois-ci, l’idée est encore plus brillamment stupide, il s’agirait d’organiser un nouveau Woodstock. Outre le fait que les trois quarts des glorieux vieillards seront absents pour cause de décès, l’idée de ce second Woodstock est un non-sens absolu. Le festival n’était pas seulement une réunion de chevelus batifolant dans la boue, c’était la réunion d’une jeunesse hédoniste, venue célébrer ses mythes, et en profiter pour saluer Dylan. Notre époque a du mal à l’accepter, mais il ne peut pas y avoir de second Woodstock, tout comme il ne peut y avoir de nouveau Hendrix, Dylan, Stones, et j’en passe. Cet événement, comme tout ce qui se rapporte à la Pop et la production artistique, était unique, un feu d’artifice dans un ciel dégagé. Alors, si ceux qui ont eu cette idée ne pensent pas seulement à vendre des tickets hors de prix à de vieux moutons nostalgiques, j’ai une option pour sauver leurs crédibilités dans le show-business. D’abord, n’insistez pas trop sur le coté nouveau Woodstock, comme je l’ai dis au dessus cette expression n’a aucun sens. Ensuite, et surtout, laissez les vieillards dans leurs mapades dorés. J’ai déjà votre tête d’affiche mes petits grossistes de la culture Pop et elle se nomme Rival Sons.

Ne faites pas ce que font la plupart de votre public cible, qui vomit stupidement sur tout ce qui ressemble de prêt ou de loin à des artistes qu’ils jugent indépassables. Oui, le Rock a aujourd’hui réinventé le délit de blasphème, mais c’est à vous de tourner le volant pour lui éviter de se prendre le mur. Et, dans ce domaine, les Rival Sons planent au-dessus de la mêlée depuis le raz-de-marée provoqué par Great Western Valkyrie. C’était il y a quelques années déjà. En fait les américains étaient déjà grandioses sur leurs premiers albums, et Head Down était presque meilleur que le disque qui leur valut le sacre du grand public. En fait, sur Great Western Valkyrie, les musiciens l’ont joué fine, augmentant leur puissance de feu en sachant que le résultat ne manquerait pas d’être considéré comme le nouveau Led Zep’. Le second disque de Led Zeppelin est devenu un maître étalon vénéré, au point que les hard rockers ne peuvent violer le Hard Blues sans que la performance subisse cette comparaison plombante. En fait, la place laissée au clavier corrosif sur une bonne part de l’album me ferait plutôt vaguement penser aux premiers Deep Purple, mais là n’est pas la question.

La vraie nature de Rivals Sons était dans cette science de la mélodie, qui brillait bien plus sur Head Down. Prendre ses racines beaucoup plus profondément, en tirer la plus magnifique substance, et la resservir dans une formule virtuose mais jamais pompeuse, voilà le credo qui leur a permis de renvoyer la concurrence au bac à sable. Dans cette optique, Great Western Valkyrie était un intermède, un bref retour à l’innocente brutalité de leur premier disque. Une fois le grand public attiré dans leurs filets rythmiques, il fallait l’emmener ailleurs avant que la sauce ne retombe. C’était le rôle de Hollow Bones, sorti en 2016, dont la splendeur n’était pourtant qu’une étape menant à ce Feral Roots que l’on se prend littéralement dans la figure.

Je ne sais pas si les Rival Sons atteignent ici le sommet de leur brillant périple, je l’ai dit à presque chacun de leurs albums, et à chaque fois ils m’ont fait mentir. Ce qu’ils écrivent, depuis maintenant 10 ans, c’est le Rock du 21ème siècle. Placé en introduction, “Do Your Worst” débarque comme un troupeau de buffles dans les plaines du sud-américain, avant d’embrayer sur un boogie acéré, débouchant sur un refrain irrésistible. Pas d’errements ici, la batterie est puissante et sèche, le chant calqué sur un groove irréprochable, et si Scott Holiday est aussi flamboyant, c’est surtout parce qu’il sait quand s’arrêter. Plus que ses solos, le moustachu ménage ses silences, laissant ses riffs claquer dans le vide, et résonant encore de longues secondes après que le coup ait été porté.

Notre époque est à la guitare rythmique, et il (Scott Holiday) pourrait bien en devenir le roi. Si vous en doutez, réécoutez les riffs de “Feral Roots” , “Back In The Woods” ou “Do Your Worst”. C’est un véritable maître du riff. Alors, bien sûr, il agrémente cette belle rigueur de larsen métallique, solos percutants, et autres friandises assourdissantes, mais ça ne masque pas cette classe pleine de feeling.

Et puis ce sont encore les mélodies que l’on retient le mieux, “Shooting Stars” à la beauté fervente d’un Johnny Cash, la puissance électrique en plus, et le morceau titre est une ballade groovy digne des grands noms de la Soul. On ne leur collera donc pas le terme Classic Rock, étiquette imposée à certains artistes, afin de vendre une autre forme de musique artificielle. Rival Sons ne célèbre rien d’autre que sa propre légende en marche. Ce dernier album a la chaleur du patrimoine musical américain, avec une production ample et un son résolument encré dans le vingt-et-unième siècle.

Alors, mesdames, messieurs ; au lieu de penser au “nouveau Woodstock”, dépêchez-vous d’écouter ce disque et d’entrer en contact avec ces grands hommes. Comme le dit si bien Jay Buchanan en clôture d’album “We came to the world like shooting stars across the sky”… Alors profitez de cette chance d’écrire notre histoire.

À bientôt sur RefrainS.

B.

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Published in Articles Chroniques

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