Les Rolling Stones reviennent sur vos écrans avec un petit nouveau de la collection “From The Vault”. Parmi les millésimes disponibles, c’est un concert de 2015 au Fonda Theatre qui a été choisi. Pour la première et unique fois de sa carrière, le groupe jouait l’album Sticky Fingers dans son intégralité. Ce concert était à la fois le premier de la tournée Zip Code Tour qui allait sillonner l’Amérique du Nord pendant quelques semaines et une célébration de l’album à la braguette.
Visionner le film d’un concert est une des occupations parmi les plus passives qui existent avec la pêche à la mouche. Déjà, si vous avez eu la chance d’y être, ça n’est pas forcément très “glop”, alors, si vous n’y étiez pas… Cela relève de l’ennui, de la torpeur. Pourtant, si nous y ajoutons un élément, il devient bien plus intéressant de se vautrer deux heures durant dans un fauteuil ou sur un canapé. Exemple : visionner le film d’un concert des Rolling Stones jouant dans une petite salle avec 1200 happy fews. Là, ça a tout de suite un peu plus de tronche.
Fonda Theatre, mai 2015 ; du beau monde, des stars (Steven Van Zandt, Bruce Willis, Carl Barât…). Un cadre intimiste qui contraste avec les concerts dans les stades auxquels les Stones nous ont habitués depuis de nombreuses années. C’est un événement exceptionnel dont le film entrecoupé de quelques interventions chiadées va nous faire le récit.
Exceptionnel de par les conditions et le rendu de la prestation scénique. Le côté “club” de cette salle pouvant accueillir seulement 1200 spectateurs donne un aspect de proximité avec le groupe très joliment mis en valeur par les cadreurs. Certes, avec moins de talent que dans Shine A Light (2008) de Martin Scorsese où le cadrage est au cœur de l’action. Une action mise également en valeur par une bonne prise son. Aucune partie, aucune note n’est oubliée. Et c’est aussi cela qui participe au fait que le film vaut vraiment son pesant d’or.
L’aspect le plus génial de ce concert réside dans le fait que pour une fois, ça change ! Ce concert est enfin l’occasion de voir les Rolling Stones qui ne jouent pas la même chose que d’habitude. Non pas que cela soit ennuyeux ou mauvais (quoique…) mais le concert permet de par le choix des chansons de les voir se comporter autrement. Il y a bien sûr les jeux de scène propres à Ronnie ou Keith et les soubresauts de Mick mais nous avons véritablement senti plus d’application et carrément plus d’implication notamment de la part des 4 membres du groupe qui font un travail remarquable pour interpréter les chansons de Sticky Fingers avec le plus de fidélité possible par rapport à l’original. Les musiciens additionnels tels que Darryl Jones, Karl Denson ou Chuck Leavell ne sont pas en retrait non plus.
Notons par exemple des versions extraordinaires et le mot est faible de “Wild Horses” et “I Got The Blues”. Mention spéciale à ce bon vieux Ron qui monte et démonte les ponts et les thèmes musicaux sur “Can’t You Hear Me Knocking” avec un soupçon d’improvisation. C’est digne d’un Mick Taylor dans ses meilleures heures…
Il y a un véritable équilibre dans cette formation au sein de laquelle la routine ne semble jamais s’être immiscée. Pourtant, après tant d’années, nous pourrions croire que le groupe qui a tout vu, tout entendu aurait choisi la facilité. La notion de travail revient souvent dans la bouche des protagonistes. Chacun avec son style bien particulier se remémore des moments liés à l’enregistrement de cet album qui a préfiguré le Rock moderne. Qu’il s’agisse de Charlie Watts aux déclarations parfois presque enfantines mais toujours très charmantes ou bien de Keith Richards qui ne manque pas de perpétuer son one man show, les interventions participent à la cohésion de l’ensemble bien qu’elles semblent avoir été recueillies à un moment totalement différent du concert au Fonda Theatre. Ces “coupures” ont une noble place et apportent une vraie plus-value à l’ensemble.
Sticky Fingers dans son entièreté sur scène et dans les conditions offertes par une petite salle fait pour sûr partie des choses les plus inespérées de l’histoire de la musique… Mises à part les quelques invitées bien testostéronées de la carrière du groupe tels que “Brown Sugar” que Jagger considère comme “la chanson ultime du groupe”, “Jumping Jack Flash”, “When The Whip Comes Down” ou l’électrisant “I Can’t Turn You Loose”, les chansons qui composent l’album sont peut-être parmi les plus difficiles de la discographie stonienne. Elles sont à la fois complexes et lentes. Revenons sur “I Got The Blues” et son “tempo si lent qu’il est quasiment impossible d’aller au bout” selon Charlie. Quant à Ronnie Wood ; il met aussi l’accent sur cette lenteur mais ne la condamne pas. Il trouve que malgré cet aspect, “les chansons ont tout de même de la pêche”. C’est encore Mick qui aura le dernier mot en précisant qu’il est bon pour les Stones d’essayer de nouvelles choses et ce peu importe le résultat. Le travail, toujours…
Après un tel moment, il est bon de revenir tranquillement à la réalité. Pourtant, nous avons eu l’impression de voir des funambules jouer sans filet. C’est forts de cette impression qu’une fois encore, à la toute fin du film sur fond de plans larges de la ville de Los Angeles, nous n’avons pas pu nous empêcher de penser : “Quelle vie”. Ça nous le fait à chaque fois. Quelle vie ils mènent. Tous ces gens qui les voient 2 à 3 fois par semaine depuis tant d’années… Encore un document qui pose des questions sur ce groupe si mythique. Parmi lesquelles : À qui est l’entrejambe sur la pochette de Sticky Fingers ? Ce concert n’a-t-il pas été celui qui a donné envie aux Stones de faire l’album Blue & Lonesome ? Ou bien encore celle qui semble être la plus importante à nos yeux : mais qu’est-ce qui peut bien faire autant rigoler Keith Richards pendant tout le concert ?
À bientôt sur RefrainS.
C.
Disponible le 29 septembre 2017 sur de multiples supports grâce à nos confrères de Eagle Vision et Universal Music Group ➥ Plus d’informations.
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